Le titre professionnel, puisque tout le monde en parle

Ma cour est la photographie, ce n’est pas le journalisme. Mais, entre vous et moi, la photographie de presse y est Ă©troitement reliĂ©e. Un dĂ©bat a cours prĂ©sentement dans la communautĂ© journalistique au sujet d’un titre professionnel de journaliste, qui serait attribuĂ© par une quelconque instance publique en situation d’autoritĂ©. Les journalistes qui respectent les règles Ă©tablies seraient donc officiellement reconnus comme professionnels.

Bien que je ne connaisse pas tous les arguments dans ce dossier, je réfléchis à tout ça et ai décidé de me prononcer sur la question dans ce court billet.

Face Ă  l’État, le rĂ´le du journaliste est clair: enquĂŞter, rĂ©vĂ©ler, ĂŞtre le chien de garde des contribuables face aux politiciens qui voudraient en cacher des bouts. Une sĂ©paration parfaite entre les deux domaines doit donc exister. L’idĂ©e que l’État puisse avoir un certain contrĂ´le sur l’accession des prĂ©tendants au titre de journaliste pose, Ă  mes yeux, un malaise Ă©vident. La première victime serait le journalisme d’enquĂŞte. Qui oserait se pencher sur les potentiels abus du gouvernement s’il sait que celui-ci peut lui retirer son titre?

Au-delĂ  de cette question d’indĂ©pendance entre le journalisme et le politique, il y a aussi toute la question de la bureaucratie, de la paperasse, des dĂ©lais, bref du trouble pour gĂ©rer l’accession au titre, spĂ©cialement pour l’aspirant! Une pratique sans reconnaissance lĂ©gale ne pose d’ailleurs aucun risque pour la sĂ©curitĂ© de la population. Ce n’est pas comme la mĂ©decine ou les soins infirmiers.

C’est pourquoi je prĂ©fère, et de loin, le modèle de l’autorĂ©gulation que reprĂ©sente le Conseil de presse du QuĂ©bec (CPQ). Qu’en est-il, alors, de l’alternative proposĂ©e par l’organisme qui consisterait Ă  rendre obligatoire l’adhĂ©sion au CPQ?

Comment dĂ©terminer Ă  partir de quelle grosseur un mĂ©dia doit ĂŞtre membre? Est-ce que des mĂ©dias indĂ©pendants comme le CMAQ, Faits et Causes, Projet J, Le Couac, L’Aut’Journal, et j’en passe, devraient eux aussi payer les droits d’entrĂ©e au Conseil malgrĂ© leur petite taille? Si non, oĂą est la ligne?

Et si la solution passait plutĂ´t par un volontariat fortement encouragĂ©? J’explique. Les mĂ©dias seraient libres d’adhĂ©rer ou non au CPQ. Par contre, tout l’appareil public pourrait rĂ©server les privilèges accordĂ©s aux mĂ©dias Ă  ceux qui sont membres du CPQ. Les autres, vous prendrez le tĂ©lĂ©phone alors que vos concurrents membres seront dĂ©jĂ  en train de publier la nouvelle. Les mĂ©dias y penseraient par deux fois avant de renoncer Ă  leur accès Ă  la tribune parlementaire. Des entreprises privĂ©es pourraient, elles aussi, exiger l’adhĂ©sion au CPQ lorsqu’elles rencontrent des reprĂ©sentants des mĂ©dias.

Par ailleurs, question de ne pas restreindre l’accès aux petits mĂ©dias, aux mĂ©dias Ă©tudiants et aux mĂ©dias amateurs, le CPQ pourrait, de son cĂ´tĂ©, s’assurer que leur adhĂ©sion soit possible, simple et Ă©conomique, leur procurant ainsi les mĂŞmes privilèges qu’aux gros conglomĂ©rats.

En somme, le titre professionnel me semble prĂ©senter un trop grand risque de dĂ©rapage, en plus d’exclure trop de monde. Le volontariat me semble beaucoup plus adĂ©quat ici si on lui accroche un privilège considĂ©rable. Il permettrait en mĂŞme temps aux organisations et aux entreprises de prendre un peu leurs responsabilitĂ©s dans le monde de l’information.

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